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Organisateur
e-joussour, Portail de la société civile Maghreb-Machrek
Lieu
Dakar
Date
2010-02-06 2010-02-10

Dans le cadre du processus de préparation du Forum Social Mondial à Dakar, une centaine de personnes, venues du Maroc, du Mali, du Sénégal, du Niger, du Togo ou encore d’Afrique du Sud, ont participé, ce dimanche 28 Novembre, au Forum africain sur les « Droits Culturels », organisé par le Forum des Alternatives Maroc (FMAS), Racines (représentant marocain du Réseau africain Arterial network) et le Collectif des Abattoirs, à la Fabrique Culturelle des Abattoirs de Casablanca.

Ce forum constituait un espace ouvert de débats, d’échanges et de discussions sur les questions de la culture comme un droit humain indissociable des autres droits, sur le rôle de la culture dans le développement et les politiques culturelles au Maroc et en Afrique.

L’objectif de cette rencontre était de réunir des acteurs culturels et de la société civile africains pour préparer une présence commune sur les « Droits culturels » lors du prochain Forum Social mondial qui aura lieu à Dakar (Sénégal) du 6 au 11 février 2010.

« Les différentes dimensions des droits culturels »

Hamouda Soubhi, du FMAS, a introduit la rencontre sur le thème « Culture et Forum Social Mondial » en inscrivant ce forum dans le processus des différents forums thématiques préparatoires au Forum Social Mondial qui ont eu lieu ou vont avoir lieu au cours de cette année dans la région Maghreb-Machrek : Forum des Mouvements Sociaux et des Forums Sociaux au Maghreb (Mars 2010 – Maroc), Forum Syndical Maghrébin (Mai 2010 - Algérie), Forum pour la Santé et l’Environnement et la Terre (Octobre 2010 - Egypte), Forum Mondial de l’Education (Octobre 2010 - Palestine), Forum Social des Associations et des Organisations Communautaires de Base (Octobre 2010 - Maroc), Forum sur les Droits des Femmes (Décembre 2010) et Forum sur l’Immigration (Décembre 2010 - Belgique).

Mamou Daffé, d’Arterial Network, a ensuite axé son intervention sur le thème « Culture et développement ». Il a mis l’accent sur les connexions qui existe entre les domaines culturel et économique. Il a présenté la culture comme un facteur de développement économique et social qui participe à la cohésion sociale et à l’intégration des catégories les plus défavorisées.

L’Afrique n’a pas été acteur de la première révolution industrielle, elle ne doit pas rater la deuxième, celle des nouvelles technologies de l’information et de la communication. L’Afrique doit développer de nouvelles stratégies pour être acteur de cette révolution. Il faut à la fois, inventorier les gisements et acteurs culturels mais aussi accompagner l’Etat et faire du lobbying pour une vraie stratégie culturelle. Au Mali, le secteur de la culture représente 2,4% du PIB et crée 5,9% des emplois, alors que le secteur des banques et assurances ne représente qu’1% du PIB. La culture est donc génératrice de richesses et constitue une opportunité pour l’Afrique.

Aadel Essaadani, du Collectif des Abattoirs, a parlé d’« Accès à la culture et démocratie ». Il a insisté sur l’importance d’aller vers les publics privés de l’accès à la culture, les personnes issues des quartiers populaires, défavorisés, isolés des lieux culturels… Il faut initier les gens à la culture, adapter les produits culturels au public marocain, intégrer la notion du « public » dans les programmations. La création constitue un potentiel important qui est inexploité faute un système d’exploitation pour fructifier le patrimoine culturel et architectural marocain. Tout cela est lié à l’absence de la culture dans les cursus scolaire.

Tijani Elhamzaoui, du Réseau amazigh pour la citoyenneté, a parlé de « Diversité culturelle et droits ». Selon lui, il y a deux sortes de luttes : celle pour la place de la culture marocaine par rapport à l’invasion de la culture occidentale et celle pour la question de la spécificité de la langue amazigh. Les grands festivals marocains affichent des invités de renommé internationale et ne laissent pas la place aux productions nationales. Les acteurs culturels et la société civile doivent faire pression sur l’Etat pour protéger la culture locale et lui donner une place et revoir le politique d’aides attribuées aux acteurs culturels. Le Maroc est en train de perdre ses langues et patrimoines culturels.

Ateliers de travail thématiques

L’après-midi a été consacré au travail en groupe autour de deux thématiques.

« Quelle stratégie pour installer la culture comme droit humain ? »

Les participants ont d’abord discuté de la question de l’éducation à la culture et à la création. Ils ont fait le constat que l’initiation aux arts et à la culture est quasiment absente des cursus scolaires, les beaux-arts ne sont pas enseignés à l’école. Ils ont également déploré le fait que le Ministère de la Culture et des Beaux-Arts est devenu seulement le Ministère de la Culture, la notion de beaux-arts a tout simplement été abandonnée. Bien qu’il existe certaines dynamiques artistiques et culturelles, les politiques ne donnent pas les moyens suffisants pour favoriser l’accès à la culture et à l’art. Les maisons de jeunes, les conservatoires, etc. sont gérés de façon très administrative.

Fort de ces constats, le groupe a formulé les propositions suivantes : 

  • Ne pas attendre une décision politique mais la provoquer en faisant notamment un travail de plaidoyer basé sur des propositions d’alternatives, et développer un partenariat public/privé ; 
  • Réaliser des interventions dans les écoles, dans les institutions culturelles, etc. ; 
  • Mettre en place les Etats généraux de la culture (en présence d’acteurs étatiques, de la société civile et culturels), capitaliser sur les différentes initiatives existantes et les développer vers un service public de la culture ; 
  • Responsabiliser les acteurs économiques en tant que relais d’influence et de financement pour développer la culture à l’école ; 
  • Réfléchir pour rendre effectif le Pacte national pour la culture ; 
  • Donner la priorité aux acteurs culturels pour la gestion des structures culturelles et artistiques ; 
  • Revoir le cadre juridique et institutionnel de gestion de la culture au niveau national.

« Culture et forum social, quelle mobilisation africaine pour Dakar ? »

Le groupe a affirmé son souhaite de réaliser une mobilisation commune à Dakar au sein d’un espace où la culture sera posée en termes de droit humain et pas simplement en tant qu’animation culturelle. Plusieurs propositions ont été formulées dans ce sens :

  • Rassembler les acteurs culturels et de la société civile pour mener des actions communes dans le domaine culturel et artistique ; 
  • Créer une synergie entre les acteurs d’Afrique et d’Amérique latine ; 
  • Mettre en place un espace informatif avec de la documentation sur les expériences culturelles, les outils existants, etc. 
  • Élaborer à Dakar un plan d’action pour les deux années à venir en matière de politiques culturelles.

Suite à cette rencontre, une mailing-liste a été créée pour travailler plus concrètement sur la programmation et les aspects pratiques de la mobilisation qui aura lieu à Dakar. L’idée a été évoquée de mettre en place une « caravane » pour se rendre au forum.

Les droits culturels : des droits fondamentaux

A la fin du Forum les participants ont lancé un appel pour que les droits culturels soient reconnus comme un droit fondamental. Ils ont également appelé à : 

  • La tenue d’assises nationales pour la culture au Maroc et dans d’autres pays ; 
  • La prise en compte du droit dans la mouvance des forums sociaux ; 
  • La concertation des acteurs culturels, des artistes, de la société civile pour développer ces travaux ; 
  • L’adhésion à l’action mondiale qui travaille dans le même sens pour une culture démocratique qui respecte les droits ; 
  • Le soutien aux actions des Abattoirs pour la sauvegarde du patrimoine et de l’architecture marocaine, mais aussi en tant que lieu d’expression artistique et de défense des droits culturels.

La journée s’est clôturée par la projection en avant première, du film amazigh « Tichka », en présence du réalisateur Rami Fijjaj.